Tant que nous sommes vivants d’Anne-Laure Bondoux

Age :  15 ans et +
Éditeur : Gallimard jeunesse (2014)
400 pages

Note : 5 out of 5 stars

Bo et Hama travaillent dans la même usine. Elle est ouvrière de nuit, lui forgeron le jour. Dés le premier regard, ils tombent amoureux. Leur quotidien, rythmé par l’usine et les sorties au Castor blagueur, est heureux. Mais le jour où l’Usine explose, Bo et Hama perdent tout. Obligés de fuir la ville dévastée, ils débutent un fabuleux périple à travers des territoires inconnus…

Anne-Laure Bondoux est une auteur phare de la littérature young adult française. Oserais-je pourtant vous avouer que d’elle, je n’avais jusqu’ici lu que sa dystopie Le Destin de Linus Hoppe ? Oui. Et c’est un regret aujourd’hui car ma lecture de Tant que nous sommes vivants m’a montrée à côté de quoi, jusqu’ici, j’étais passé.

Au départ, ce qui m’attire dans Tant que nous sommes vivants, c’est la couverture. Un choix très particulier. Noir et blanc. Très sombre : entre lumière et ombre. Deux « couleurs » qui s’opposent à l’image de la construction singulière de ce roman où chaque chapitre porte pour titre deux contraires ( bruit et silence, vide et plein, ordre et désordre, perte et gain, quiétude et inquiétude…). Une architecture littéraire originale où le titre de chaque chapitre trouve toujours un écho particulier dans le texte qui suit. C’est comme si Anne-Laure Bondoux était partie de ces oppositions pour avancer dans l’histoire. Un tel défi n’a pas dû être simple à relever et le résultat  révèle déjà une partie du long travail d’écriture de l’auteur.

L’univers dans lequel nous plonge Anne-Laure Bondoux avec Tant que nous sommes vivants est un univers étrange, vaporeux, flou et très noir. On se focalise uniquement sur l’Usine, l’environnement qui entoure les personnages principaux mais pour le reste du monde, les allusions sont très parcellaires. Difficile de situer cette histoire, même si on devine qu’elle a lieu dans le futur. Ce monde est dur, froid et en guerre. Il ne donne pas envie.
D’ailleurs, le début de Tant que nous sommes vivants m’a tout de suite rappelé l’univers de Métropolis, un vieux film de science-fiction de Fritz Lang. Anne-Laure Bondoux reprend cette image de Métropolis où l’on voit une centaine d’ouvriers sortir de l’usine tandis que d’autres entre. C’est un peu l’ambiance du cinéma allemand des années 20, à la sauce Fritz Lang que l’on retrouve dans Tant que nous sommes vivants. Pour les connaisseurs, c’est une ambiance très sombre et avec une vision du monde très pessimiste…

J’ai fais dédicacer ce roman par Anne-Laure Bondoux lors du Salon du livre jeunesse de Montreuil 2014. J’avais du mal à classer ce roman, à déterminer son genre. Il est très différent de ce que j’ai pu lire jusqu’ici. Finalement, ce sont les mots d’Anne-Laure Bondoux dans ma dédicace que je vais reprendre car selon moi ils illustrent parfaitement la singularité de Tant que nous sommes vivants : « un roman industriel, magique, poétique, chamanique, pour accompagner les transformations que nous vivons, tous, tout au long de nos vies… » Pour moi, c’est exactement le ressenti que j’ai après ma lecture.
Tant que nous sommes vivants raconte l’histoire d’un couple, qui va vivre un voyage initiatique au travers les différentes étapes de leur existence. Une vie faite de joies, d’amour puis de renoncement, de déchirure, de douleur. C’est le plus souvent très fort, très intense.

Enfin, ce qui parfait le tableau déjà sans faute de Tant que nous sommes vivants, c’est le travail d’écriture d’Anne-Laure Bondoux. L’auteur qui n’avait rien publié depuis 2011, a largement mérité d’attendre trois années pour nous livrer ce texte d’une grande qualité. Chaque passage semble avoir été travaillé dans ses moindres détails pour que les mots sonnent justes, que les paroles nous touchent. Je suis admirative de cette écriture souvent poétique qui a su mettre en mots cette histoire si particulière. Je crois sincèrement que c’est ce travail d’écriture qui fait de Tant que nous sommes vivants un roman particulièrement intense, prenant et touchant.

En quelques mots :

Tant que nous sommes vivants, le dernier roman d’Anne-Laure Bondoux est un roman saisissant et singulier qui nous émeut et nous touche du début à la fin. Roman initiatique, roman industriel, roman magique, il nous transporte dans la vie de Bo et Hama, deux personnages envoutants. L’écriture, de grande qualité, rend ce roman particulièrement intense et prenant. Tant que nous sommes vivants est un roman sans concession, sombre, bluffant à tous les niveaux.

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