Age : 15 ans et +
Éditeur: Milan jeunesse : Macadam (2010)
230 pages
Note :
C’est le 21 juin et la soirée s’annonce bien pour Rodrigues. Il va voir chanter Aurélie dans le groupe de rock Nuit rouge. Il l’aime et il est persuadé que la jeune fille n’est pas indifférente à lui non plus. Aussi, lorsque la soirée se prolonge, ils s’enfoncent tous les deux dans un square. Rodrigues fait l’amour avec Aurélie. Le lendemain, le cauchemar commence. La police vient le chercher à son domicile car Aurélie accuse l’adolescent de l’avoir violée. Rodrigues, lui, est convaincu de n’avoir pas commis ce viol.
Les Carcérales est vraiment un livre exceptionnel de mon point de vue. D’abord par l’extrême concentration du sujet et surtout la capacité de Magali Wiener à retranscrire avec précision toutes les étapes de l’avancée de l’enquête jusqu’au procès.
Divisé en cinq chapitres, Les Carcérales commence le jour où Rodrigues va à la fête de la musique, et s’achève sur la prononciation de son jugement en plus d’un petit épilogue qui revient sur le ressenti de Rodrigues sur toute cette affaire. Entre ces deux pôles du roman, la soirée, l’acte, la mise en examen, les interrogatoires durant la garde à vue de 48 heures, et enfin, son année en prison.
D’abord heure par heure, et ensuite d’un jour à l’autre durant la prison, Rodrigues nous confie les étapes de ce cataclysme qui lui est tombé dessus. Il se refuse à croire qu’il a violé Aurélie et pour lui, la jeune fille ment. Il se présente comme un adolescent sympathique, sensible et pacifiste. Passionné de natation, il attend le mois de juillet pour rejoindre son père sur une île. Mais tout est bouleversé par cette histoire.
Côté lecteur, le suspense est grand car même si Magali Wiener nous a raconté la manière dont l’acte avait été fait, on n’hésite entre culpabilité ou non de Rodrigues. Si on en sait plus que les policiers, les psychologues, les éducateurs, les juges, les jurés, on demeure dans un flou assez important. De cette manière, Magali Wiener passionne son lecteur et l’empêche de lâcher le livre avant de connaître le jugement, qui n’apportera pas forcément plus de réponse. A chacun de se forger son opinion et c’est ce qui fait d’ailleurs toute l’originalité et le piment de Les Carcérales. En effet, nous sommes à la fois en position de voyeur, puisque nous connaissons les événements et en position de juge vis à vis de ces événements. Le fait de connaître les pensées intimes de Rodrigues ne nous renseigne pas plus car il clame son innocence tandis que la manière dont les faits sont racontés donnent plutôt à penser à l’inverse, mais là encore c’est contestable ! un vrai méli-mélo qui donne l’impression de faire partie de l’assemblée des jurés avec quelques informations en plus.
D’ailleurs, pour le chapitre du jugement, Magali Wiener adopte un point de vue omniscient et on a l’impression d’être une caméra qui filme et la salle d’audience et la salle de délibération. Avec justesse l’auteur retranscrit toutes les étapes du jugement. ça me faisait un peu penser à l’atmosphère du film Douze hommes en colère.
L’incarcération est aussi un autre moment capital du livre, il s’agit d’une incarcération provisoire, dans l’attente du jugement et qui s’éternise dans le temps. Tout sonne aussi très juste dans la manière dont Magali Wiener décrit le quotidien de Rodrigues. Il est question de la violence qui y règne, de l’ennui des détenus, de l’organisation de la vie en prison et la pratique du sport apparaît comme le seul recours à l’ennui des détenus… Au moment de la délibération, un court débat se fera sur le bien fondé ou non de la prison chez les adolescents.
En somme, Les Carcérales est un livre étonnant et captivant, qui nous entraîne du début à la fin dans la tête d’un coupable de viol, encore adolescent. Le tout donne lieu à un roman fort, poignant et sensible sur le thème de l’amour mal exprimé.