Age : 15 ans et +
Éditeur : Gallimard jeunesse (2010)
395 pages
Note :
Nicholas Dane a 14 ans, ce n’est pas un ado facile mais il est loyal. Le jour où sa mère meurt à cause d’une overdose, il se retrouve seul. Mrs Batts, l’assistante sociale refuse qu’il aille vivre avec Jenny, la vieille amie de sa mère Muriel et l’envoie dans une institution. Mais Meadow Hill n’est pas un endroit où il fait bon de vivre : la violence règne et l’ambiance est morose et glaciale. Nicholas Dane, encore bouleversé par les événements a du mal à s’adapter et pense trouver dans le directeur adjoint, Tony Creal, du réconfort, jusqu’à ce que tout dérape. Plus qu’une seule chose compte alors pour lui : fuir !
La particularité des derniers romans de Melvin Burgess sont d’aborder des sujets sensibles qui touchent à l’adolescence (comme la chirurgie esthétique avec Le Visage de Sara), des sujets rarement évoqués dans la littérature pour adolescents (comme la sexualité avec Une Idée fixe) voire des tabous (comme Junk, sur l’univers de la drogue et de la rue).
C’est dans un mélange de ces trois tendances qu’il faut situer Nicholas Dane. Roman sur l’adolescence, avec un Nick en pleine construction de lui-même, confronté à la mort de sa mère. Roman sur un sujet peu évoqué : la vie en institution, en orphelinat. Enfin, roman tabou car il sera question de violence et de pédophilie dans ces institutions ainsi que de la vie dans la rue pour des ados en perdition.
Nicholas Dane se passe dans les années 80 mais jamais Burgess ne donne dans son roman de date précise ce qui laisse comprendre que si les institutions pour enfants abandonnés ou orphelins, se sont un peu améliorées, ce n’est pas forcément le cas partout. Un sujet qui ne pouvait pas manquer d’intéresser Melvin Burgess, auteur dont la réputation n’est plus à prouver lorsqu’il s’ahit de provoquer et de décrire sans artifices les situations qui se passent dans ces lieux, à la limite du dicible.
Nicholas Dane est un livre choc et fort, sur la violence et la pédophilie au sein des institutions. Melvin Burgess se place aux côtés de Nick, suivant sa vie à Meadow Hill, son errance dans la rue et livrant à chaque fois ses pensées. Il nous les retransmet avec la distance du « il » tout en gardant la puissance des sentiments ressentis par l’adolescent.
Mais Burgess est aussi un narrateur qui parfois connaît la suite de l’histoire ou tout simplement la situation d’autres personnages, et c’est sur un ton tout aussi dur qu’il partage ses informations avec le lecteur médusé.
Nicholas Dane est un roman que j’ai lu d’une traite et qui m’a bien secoué par la vérité crue qu’il révèle : les sévices, les coups reçus sont décrits sans occulter quoi que se soit, alors que les scènes de pédophilie sont plus suggérées ce qui permet à Melvin Burgess de plus accentuer son texte sur le mal être de Nicholas Dane.
Au cours du roman, Nick change et comme le fait remarquer Jenny à un moment, il se renferme sur lui même. Plus que la violence physique, c’est la violence psychique qui atteint Nicholas. Le viol dont il est la victime le traumatise plus durablement que toutes autres violences.
Nicholas Dane peut se diviser en quatre parties inégales, avec une insistance évidente sur la deuxième et la troisième parties. En effet d’abord nous rencontrons Nick le jour où sa mère meurt, ce qui nous permet de cerner très rapidement son caractère. Puis c’est le moment où il est à Meadow Hill. Ensuite Melvin Burgess raconte sa fuite de l’institution avec Davey et la vie qu’il mène dans la rue. Enfin, le dernier chapitre revient sur la suite de sa vie, après cette période mouvementée, permettant à Burgess de montrer que les conséquences de ce passage à l’institution ont marqué Nicholas Dane au fer rouge.
Impossible avec ce roman de ne pas être révolté, horrifié, médusé et de rester sous le choc de cette lecture au ton fracassant et sans concession. Melvin Burgess arrive à tenir en haleine son lecteur qui désire savoir comment Nicholas Dane va évoluer.
Le roman est dur, à déconseiller aux âmes sensibles et aux jeunes adolescents, mais pour les autres, Nicholas Dane, sera un livre exceptionnel, sur un sujet qui méritait qu’on s’y intéresse de front et sans masque.