Age : 9 – 12 ans
Éditeur : Gallimard jeunesse ( 2020 )
340 pages
Note :
La Cornucopia était un petit royaume heureux. On n’y manquait de rien, le roi portait la plus élégante des moustaches, et le pays était célèbre pour ses mets délicieux: Délice-des-Ducs ou Nacelles-de-Fées, nul ne pouvait goûter ses gâteaux divins sans pleurer de joie ! Mais dans tout le royaume, un monstre rôde : selon la légende, l’Ickabog habitait les Marécages brumeux et froids du nord du pays. On disait de cette créature qu’elle avait de formidables pouvoirs et sortait la nuit pour dévorer les moutons comme les enfants…
C’était évidemment la publication surprise de l’année. A la fin de la parution d’Harry Potter, J.K Rowling s’était jurée de ne plus publier de littérature jeunesse pour des raisons que l’on peut aisément deviner. Mais la Covid-19 et le côté inouïe de l’année 2020 auront donné envie à l’autrice de faire plaisir aux jeunes ( et moins jeunes ) lecteurs. C’est ainsi que L’Ickabog, ce conte qu’elle avait inventé pour ses enfants a été exhumé et que chaque chapitre a été publié d’abord sur son site internet, lors du confinement généralisé de la planète. A situation inédite, publication inédite donc.
En fan absolue ( comme beaucoup d’autres) d’Harry Potter, difficile de ne pas être tentée par la lecture de L’Ickabog, quand bien même le livre n’a rien à voir. Justement je dirais même que c’est cela qui m’a le plus donné envie de découvrir ce roman : lire quelque chose de différent de l’autrice, en littérature jeunesse, et voir si la magie, à nouveau, allait opérer. Verdict ? Certes L’Ickabog n’a pas l’aura d’Harry Potter mais j’ai quand même eu énormément de plaisir à lire ce livre dont je n’attendais de toute manière rien de particulier. Si J.K Rowling se refusait à publier de la littérature jeunesse c’est peut-être parce qu’on aurait tendance à attendre d’elle trop, beaucoup trop ( alors qu’à vrai dire, je pense raisonnablement que le succès d’Harry Potter l’a complètement dépassée…)
L’Ickabog est un livre qui de prime abord peu dérouter et ce fut d’ailleurs mon cas. N’ayant pas lu de contes depuis l’enfance, il a fallu que je réapprivoise ce genre particulier aux ressorts souvent manichéens. Le style est d’abord étonnant. D’une part il y a un recours surprenant à une litanie de superlatifs (ce qui peut agacer) mais donne aussi le charme de l’univers qui se dessine peu à peu et, d’autre part, l’écriture est très « orale ». En effet, par un procédé que je suis bien incapable d’identifier ( les profs de français seront peut-être plus doués que moi pour ça), J.K Rowling nous donne le sentiment de nous raconter à voix haute son conte. Il y a dans L’Ickabog une tonalité, un rythme qui fait que l’on retrouve le plaisir de l’enfance lorsque nos parent ou grands-parents nous lisait un conte.
L’histoire en elle-même est sympathique et fourmille de rebondissements, de personnages. Le propos est très manichéen mais c’est aussi ça qui fait le charme de la lecture. La mise en scène de ce monde de Cornucopia qui voit le mal l’envahir est finement racontée. Comme tout bon conte, il y a aussi énormément de clins d’œil pour les adultes qui peuvent mettre les événements de la Cornucopia en parallèle avec les ressorts des mécanismes des dictateurs lorsque ceux-ci prennent le pouvoir. J’ai beaucoup aimé cette double lecture et le personnage de Crachinay est à ce titre très intéressant. J’ai aimé aussi la naïveté du roi Fred ( attachant dans sa bêtise ! ), la courage de Daisy et la gentillesse de Bert. De manière plus générale, J.K Rowling excelle à créer une galerie de personnages multiples, variés, fascinants et séduisants.
Lecture inattendue de cette fin d’année, L’Ickabog m’a surprise et plu. Je ne voulais pas mettre la barre trop haut en débutant cette lecture au risque d’être déçue et c’est finalement en le considérant comme une lecture classique ( et non de mon autrice fétiche ) que je pense qu’on y prendra le plus de plaisir.