Age : 12 – 15 ans
Éditeur : Rageot (2020)
180 pages
Note :
Marina, 13 ans, et son petit frère Vania viennent de s’installer avec leur mère dans une nouvelle ville, pour une nouvelle vie. Leurs parents se sont séparés il y a peu et plus rien n’est comme avant. Quand Marina découvre que sa mère a été licenciée et qu’elle perd pied, elle décide de tout faire pour que personne ne s’en aperçoive de crainte qu’on ne les sépare. Mais Marina peut-elle donner le change encore longtemps au collège et auprès de son père ? Et qui tentera de percer le mur de silence dont elle s’est entourée ?
Sophie Rigal-Goulard est une autrice touche à tout. Elle nous livre aussi bien des histoires drôles et légères que des romans sur des sujets plus difficiles. Elles est de cette deuxième catégorie là. L’autrice fait ainsi le choix d’y aborder l’alcoolisme parental et met particulièrement en lumière son impact sur la vie familiale et la construction de l’identité, notamment à l’adolescence.
Elles, c’est d’abord l’histoire de Marina. A 13 ans, la jeune fille a grandi d’un coup, par la force des choses après le divorce de ses parents. En effet, depuis ce dernier, sa mère va mal et elle se noie dans l’alcool, ratant tous les événements importants de ses enfants et les plongeant aussi dans une précarité financière lorsqu’elle perd son travail. Le quotidien est dur pour Marina, qui s’efforce de protéger son petit frère Vania et d’assurer les apparences dans son nouveau collège…
Elles, c’est aussi l’histoire de Justine, professeur-documentaliste dans le collège de Marina. Elle est aussi une personne torturée par les souvenirs de son passé, par les phrases de son père alcoolique qui tournent en boucle dans sa tête, malgré son décès. Elle manque de confiance en elle et est très vite interpellée par l’attitude de Marina, cernant vite son mal être.
Sophie Rigal Goulard nous plonge dans les pensées intimes de Marina et Justine. Avec la première, l’autrice évoque l’épuisement qu’entraîne la situation à laquelle Marina est confrontée. On perçoit très bien toute la détresse, la culpabilisation, la honte, la colère et la tristesse qui habitent Marina. C’est une adolescente perdue, qui s’oublie et joue un rôle qui ne devrait pas être le sien. Néanmoins elle ne dit rien car elle a aussi peur qu’on découvre toute la vérité et que cela détruise définitivement sa mère…
Avec Justine, c’est plus l’impact moral des parents maltraitants, toxiques qui est abordé. Le père de Justine partageait avec la mère de Marina le goût pour l’alcool. Un alcool mauvais, qui l’amenait à brimer Justine, à la dévaloriser, à la moquer et la maltraiter verbalement. Ses mots sont aujourd’hui l’auteur des maux de Justine…
Dans Elles, j’ai trouvé le ton juste et les situations crédibles. J’ai bien aimé le lien qui se tisse, avec finesse, entre Marina et Justine. Loin de s’immiscer brutalement dans les soucis de Marina, Justine, par ses conseils de lectures ( par contre peu réalistes, pour une élève de collège, à mon sens) parvient à installer entre elles la confiance. Ces deux parcours de vie sont aussi très touchants.
J’aurai peut-être aimé que le livre soit un peu plus long, aille davantage en profondeur dans certains aspects psychologiques et notamment pour le personnage de Justine. J’aurai aimé que Sophie Rigal-Goulard étoffe un peu plus l’impact psychologique des paroles du père sur sa construction personnelle. Le roman racontant quelques instantanés sur l’année scolaire, pour l’une ou l’autre, on a parfois l’impression que chaque personnage évolue un peu vite dans son cheminement personnel (surtout Justine, là aussi). J’ai aussi trouvé que la fin était un peu rapide, j’attendais un peu plus que cette porte grande ouverte sur l’avenir.